Lettre ouverte aux journalistes couvrant le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan

8 October 2020

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Chers amis journalistes,

Il est plus que jamais nécessaire de sensibiliser l'audience au conflit entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie qui est une menace sérieuse à la paix et la prospérité de la région.

Jeunes professionnels d’origine azerbaïdjanaise vivant et travaillant en Belgique depuis bien longtemps, nous contribuons à la vie socio-économique et culturelle des pays européens dans lesquels nous nous trouvons. Nous sommes convaincus que la paix est la meilleure des solutions, mais qui ne peut pas être atteinte sans que la justice soit rendue.

Comme tout conflit, un éclairage des parties prises de tous les acteurs est indispensable. Dans cette optique, un rappel du contexte dans lequel s’inscrit le conflit acquiert une importance particulière et nécessite une approche plus délicate. Nous nous permettons de partager notre vision avec vous, afin de vous aider à mieux couvrir les événements actuellement en cours sur le territoire azerbaïdjanais.

Il convient de noter, tout d’abord, qu’Il ne s'agit pas d'une nouvelle guerre, mais de la continuation de la guerre “mise en pause” en 1994. Elle ne se fait que sur le territoire d'Azerbaïdjan (reconnu par l'Union européenne, l'ONU parmi d’autres). L'Azerbaïdjan n'attaque pas un autre pays, mais tente de libérer les territoires occupés par l'armée arménienne tel qu'indiqué dans des résolutions du Conseil de Sécurité de l'ONU (822 / 1993853 / 1993874 / 1993884 / 1993).

Ces résolutions exigent que les forces arméniennes “se retirent immédiatement, complètement et inconditionnellement” des territoires occupés de la République d’Azerbaïdjan.  Selon l’ONU et le Conseil de l’Europe, c’est la République d’Arménie, et non pas une troisième force, qui est reconnue responsable pour l’occupation.

L’Arménie n’a fait preuve d’aucun effort de concession depuis le cessez-le-feu de 1994. En même temps, la présence de 800 000 déplacés ou réfugiés internes, victimes d’un nettoyage ethnique effectué par l'armée arménienne dans les territoires occupés, rendait la situation intenable et résurgence de la guerre inévitable.

Les souffrances subies par la population locale et nos craintes pour la vie de nos familles ne tolèrent pas les simplifications véhiculées par certains médias dans la méconnaissance de l’origine du conflit et son impact au niveau régional.

Nous espérons que vous prendrez en considération nos remarques dans vos communications à venir, et ne permettrez pas aux détails secondaires de dévier l'attention des lecteurs des vrais enjeux du conflit. Dans un souci de permettre à des différentes voies de s'exprimer, nous serions heureux d'apporter davantage d'éclairage, sous forme d’article d’opinion, d’entretien ou témoignages.

Nous sommes préoccupés par la tendance généralisée de décrire la situation actuelle dans les médias francophones. Dans l'ère de dématérialisation massive de l'information, un dialogue entre les acteurs intéressés nous paraît indispensable. Nous sommes conscients que les rédactions ne disposent pas assez d'expertise dans le domaine, et c'est tout à fait normal. Mais il serait irresponsable de laisser des sources de propagande ternir l'image du journalisme impartial.

Que la paix soit avec vous !

AYAPE

Le 8 octobre 2020